CONVERSATION N.1
2020
Cinq artistes et historiennes d’art échangent autour de l’art, des choix et du quotidien.
Avec Emmanuelle Antille, Nina Haab, Elisa Rusca, Laura Thiong-Toye et Isaline Vuille
Samedi 10 octobre 2020
HD video, 62’09
Couleur, son. Langue : français.
A l’invitation de Nina Haab, cinq femmes artistes et curatrices se sont retrouvées dans son atelier de l’Usine Kugler à Genève. Étant donné la situation sanitaire, leur rencontre a été diffusée en ligne ; l’une d’elles était présente par Skype pour cause de quarantaine.
Imaginée suite à la sollicitation des Swiss Art Awards, cette mise en situation reflète un aspect spécifique de la pratique de l’artiste : la conversation, l’échange qui génèrent par la suite une production d’images et d’objets. Pour initier la rencontre, Haab a posé quelques questions larges mais essentielles : comment gérer l’art au quotidien ? Comment jongler entre la pratique artistique ou curatoriale, la vie personnelle et les activités dites alimentaires ?
Cette conversation a donné lieu à de nombreux témoignages, notamment sur l’enseignement. Perçu comme une activité très importante pour celles qui le pratiquent, il permet à la fois un ancrage dans la société civile et des échanges riches entre les générations.
La place des femmes sur la scène artistique a été également discutée, partant du constat que les étudiantes sont majoritaires dans les premières années en écoles d’art puis ne se retrouvent pas aussi présentes plus tard, dans les expositions en centres d’art ou en galeries. On peut souligner que les étudiant-e-s qui ne poursuivent pas leur pratique artistique ne sont pas rares, soit qu’ils-elles s’orientent vers autre chose, soit qu’ils-elles ne parviennent pas à tout concilier au fil du temps.
Car c’est au final d’équilibre dont il s’agit et dont on a beaucoup parlé lors de cette rencontre ; problématique certes propre à chacun-e, mais particulièrement prégnante dans le cas des artistes et des curateurs-trices indépendant-e-s. Un équilibre de temps accordé à chaque pan de la vie, une balance financière souvent délicate également. Comme un jeu de Tetris, les missions professionnelles, salariées ou non, s’imbriquent ; les projets et la recherche artistique se déploient avec une ampleur variable ; la vie privée, amicale, familiale, cherchent aussi leur place.
Ce qui est apparu au fil de la discussion, c’est que la fiction de l’artiste tout-e entier-ère consacré-e à son art, hors des contingences matérielles, ne tient pas. Les difficultés financières sont fréquentes dans le milieu, et même une éventuelle reconnaissance ne résoudra sans doute pas une certaine insécurité matérielle. En ouvrant ainsi la parole sur ces problématiques, Haab a souhaité amener sur la place publique ce qui reste habituellement de l’ordre du privé, et par l’échange d’expériences, affirmer une forme de solidarité, tout en essayant d’imaginer d’autres manières de faire.
Isaline Vuille (historienne d’art et curatrice)
Image / son : Jean-François Vercasson
Instagram Live Streaming : Valentyna Gueniat
Photographe : Guadalupe Ruiz